Le Kangourou de Préverenges, devenu Malibu à Morges – paru dans l’édition d’octobre 2016
Le Kangourou de Préverenges, devenu Malibu à Morges
Arrivé à Préverenges en 1990 pour des raisons professionnelles, Pierre-Yves Mottier ne connaissait personne. Rejoindre le corps local des sapeurs-pompiers volontaires était une évidence pour lui, car il s’agit notamment d’un excellent moyen pour rencontrer des gens. «Au fil des années, il y a beaucoup d’amitiés qui se créer entre les personnes qui interviennent», souligne-t-il. Cette année, le propriétaire du Surf Shop de Préverenges fête 30 années d’engagement. C’est à La Tour-de-Peilz que Pierre-Yves Mottier a débuté sa carrière de sapeur volontaire. «Je n’avais aucune raison d’être pompier, personne ne l’était dans ma famille. J’avais 18 ans, le recrutement débutait normalement à 20 ans, mais ils avaient besoin de volontaires et j’ai été embarqué grâce au frère d’un copain. Ma première intervention? Bien sûr que je m’en souviens, c’était peu après mes débuts, en 1987-1988. Tout le bataillon a été alarmé pour un feu à La Tour-de-Peilz. La foudre avait mis quasi simultanément le feu à deux villas. Je me suis retrouvé dans la nacelle de l’échelle à enlever les tuiles du toit. Ce fut une situation particulière», raconte-t-il.
Depuis cette période, Pierre-Yves Mottier a vécu de nombreuses autres interventions. Par exemple, alors que ses collègues étaient en train d’intervenir sur un pont passant par dessus la Venoge, le grand amateur des sports d’eau a été engagé avec son bateau professionnel pour assurer la sécurité des pompiers qui travaillaient au dessus de l’eau. «Il y avait beaucoup de courant ce jour-là, mais heureusement personne n’est tombé à l’eau», complète-t-il. Une autre intervention qui l’a marqué, particulièrement de par son intensité, fut un feu d’un parking souterrain dans la zone de La Gracieuse (Morges-Lonay) il y a une dizaine d’années. «J’intervenais à l’intérieur en tant que porteur, c’était intense entre la chaleur et le bruit.»
A la base détenteur d’un CFC d’employé de commerce, Pierre-Yves Mottier avait pour habitude de partir plusieurs mois durant l’hiver, essentiellement sur la côte ouest de l’Australie. Une absence qui ne l’a pas empêché de rester engagé pour les sapeurs durant le reste de l’année. A Préverenges, il partage son temps entre la gestion de son Surf Shop qui, au fil des ans, est passé de 2 à 30 employés, et officie comme coach pour des sportifs et des employés de petites et moyennes entreprises. Toutefois, ses absences hivernales lui ont valu deux surnoms. «Kangourou» à Préverenges, en rapport à ses séjours en Australie, et «Malibu» à Morges. «Un jour, je suis arrivé en combinaison à la caserne. Je sortais de l’eau quand j’ai reçu l’alarme et j’ai couru enfiler mes habits de pompier pour partir en intervention», sourit-il.
Car depuis le 1er janvier 1999, Pierre-Yves Mottier n’est plus affilié à la caserne de Préverenges, pourtant proche de son domicile et lieu de travail, mais à celle de Morges. Ce changement est dû à la décision de supprimer les porteurs d’appareils respiratoire de la caserne de Préverenges. Pierre-Yves Mottier souhaitait continuer d’être engagé parmi les porteurs lors d’intervention et c’est ainsi qu’il a rejoint le SISCUM (devenu SIS Morget depuis 2012). «Si t’es pas prêt à accepter les changements, ce n’est pas aux pompiers qu’il fallait être ses 30 dernières années, lâche d’un petit clin d’oeil ce père de famille. Les sapeurs subissent une restructuration et une redéfinition de leur rôle phénoménale.» Passer d’un corps villageois à un grand groupement de 29 communes, il est clair que cela a impliqué des modifications. Celles-ci, qui ont engendré des aspects positifs mais aussi quelques points à améliorer, n’ont jamais découragé Pierre-Yves Mottier qui reste fidèle à son engagement d’il y a 30 ans.
L’évolution des interventions, du matériel, sa complexité ou encore les nouveaux matériaux de constructions qui peuvent impacter l’évolution d’un feu, n’ont pas non plus découragé Pierre-Yves Mottier. Car rester toutes ces années au sein d’un corps de sapeurs volontaires, consacrer des milliers d’heures à s’exercer, se former et répéter encore les gestes pour être prêt en cas d’appel au 118 lui ont apporté beaucoup. Tant sur le plan humain que technique. «Etre aux pompiers, c’est l’occasion de travailler avec des outils et de développer des compétences et connaissances dans des domaines assez variés. A travers les formations, j’ai beaucoup appris de choses que j’utilise dans ma vie de tous les jours. Par exemple, avec les compétences de samaritains pour s’occuper de personnes blessées, cela m’a permis de ne pas avoir peur de tenir le poste de premier secours à la plage de Préverenges.» Cet engagement volontaire lui a aussi appris à savoir agir dans des situations compliquées. «C’est un gros investissement en temps, mais cet engagement est fait pour être compétent au moment où les gens ont besoin des pompiers. Et la reconnaissance des personnes sauvées est clairement la récompense», continue Pierre-Yves Mottier.
Pour lui, ce volontariat offre des compétences professionnelles, mais aussi un esprit de solidarité et de responsabilité qui peuvent être bénéfiques à l’entreprise qui emploie ces hommes et femmes. Il regrette que de plus en plus de patrons ne laissent plus partir en intervention leurs employés. Tout comme il constate que le public ne se rend pas assez compte du volume de travail volontaire et des compétences développées au fil des ans par les sapeurs.
Aujourd’hui, si un jeune hésite à rejoindre un service d’incendie et de secours, celui qui a le grade de sergent chef lui dirait que s’il est intéressé, il doit se renseigner, participer au recrutement et si cela peut lui apporter quelque chose, qu’il rejoigne les sapeurs-pompiers volontaires. D’ailleurs, à travers son Surf Shop qui le met au contact quotidien avec les jeunes, il a pu leur montrer que les pompiers ce n’est pas uniquement passer du bons temps autour d’un verre avec les copains. «J’ai pu contribuer à changer l’image que ces jeunes avaient des pompiers et plusieurs d’entre eux sont aujourd’hui sapeurs volontaires, se réjouit Pierre-Yves Mottier. Mon travail au Surf Shop me permet aussi d’être à l’aise avec les recrues et j’aime faire le lien entre les jeunes et les plus anciens.»